Jérôme Camilly est né en 1936 à Paris. Originaire de Cinarca, il passe son enfance en Corse et vit aujourd’hui à Ajaccio.
Après avoir suivi des études de lettres à Paris, il a collaboré comme grand reporter et rédacteur en chef à différents médias : Réalités-Connaissance des Arts, Radio Monte Carlo, France 2, « Envoyé spécial », « Télé Matin », et, comme scénariste, au documentaire « Les origines secrètes de l’aventure spatiale européenne » (Arte, 2008). Il a publié : L’arme de vie (La Table Ronde, 1981) ; Enquête sur un homme à la main coupée (couverture et préface de Robert Doisneau, Le Cherche midi éditeur, 1986) ; Pour saluer Cendrars. Photos de Robert Doisneau (Actes Sud, 1987) ; L’ombre de l’île (Actes Sud, 1990) ; Corse, défense d’une île (collectif, Autres Temps, 1992) ; 6 juin 44, le débarquement (Le Cherche midi éditeur, 1994) ; Le rendez-vous de Laura (roman, La Marge, 1998) ; Bonifacio, la vie quotidienne au début du XXe siècle (La Marge, 2000).
C’est sûr, je la vois avec les yeux de l’enfance : une sorte de crèche avec l’odeur de la paille et un personnage central, une femme déterminée qui ne craint personne.
On a les mythologies que l’on peut, à cet âge. C’était la fin de la guerre, la deuxième, dite mondiale – confusion et tumultes –, et, dans le film de ma mémoire, Marianne, encore aujourd’hui, continue, au ralenti, de mirer ses oeufs avec un doigté et un calme que vient contredire le débit accéléré de la parole. À intervalles réguliers, Marianne peuple mes rêves. Dans un méli-mélo d’incohérences, je reconnais le son de sa voix. Ses gestes, je pourrais les refaire devant vous, elle enveloppe ses oeufs dans du papier journal qu’elle transforme, d’un ciseau habile, en papillotes. Je la regarde, admiratif, elle les extrait délicatement de la paille et les lettres des journaux sont imprimées à l’envers sur le galbe de la coquille.
_Une enfance corse